mardi 25 mars 2008

il a toujours rêvé de vivre une époque révolue




Un film singulier. C'est le premier constat que l'on fait à sa vision. Du début à la fin. De l'affiche au film, en passant par la bande annonce. Il ne ressemble à aucun autre film actuellement en salle. Un ovni? Un ofni? Sans doute. C'est surtout un film intemporel. A cheval entre deux époques, à la fois très ancré en 2008, mais avec une atmosphère et une esthétique qui n'existe plus.
Du noir et blanc, des passages muets, des acteurs d'un autre temps (Jean Rochefort, Jean-Pierre Kalfon, Laurent Terzief), des vieux chanteurs (Bashung/Arno).........Un délice!
Car si ce n'etait qu'un simple exercice de style, cela n'aurait guère d'intérêt. Mais ici, l'esthétique est au service d'un propos, d'un regard.
Le regard d'un homme (Samuel Benchetrit) qui est nostalgique d'une époque ou les voyous ne détournaient pas 5 milliard d'Euro derrière leur ordinateur, mais simplement cinq mille franc en braquant un bar-tabac de province.
Une époque ou l'on ne vivait pas dans une société aseptisée. On ne mangeait pas bio, on fumait dans les bars, on était insouciant, on avait raison. Une époque où pour traverser la France on n'empruntait pas d'autoroute mais des petites nationales, on ne faisait pas étape chez hippopotamus mais dans un bistro. On y mangeait un steak qui avait baigné dans la matière grasse. Et alors ? Le cholesterol, on s'en fou, car l'humeur est à l'insouciance.
Une époque, ou les centres villes ne mouraient pas au profit des zones commerciales, on n'y remplaçait pas les forêts par des fast-food.
Chez Benchetrit, les gangsters sont gentils, maladroits et ils ont des pistolets en plastiques, les rockstars boivent du thé et Edouard Baer se tait (même si je n'ai rien contre ses tirades, bien au contraire).
Il rend hommage aux acteurs qui le (nous) font rêver (Trintignant, Belmondo, Bogart), aux westerns, aux polars.... Dans son film, les acteurs ne sont pas lisses, ils ont le poids des années, des épreuves de la vie, qui s'inscrivent sur leur visage. Edouard Baer n'a pas fait de musculation pour interpréter ce looser, non il a du bide, son visage est marqué.
Mais sous cet aspect âpre, il y a une vraie comédie qui sommeille. Une comédie peuplée de clowns tristes, ou l'absurde cotoie la mélancolie.
Ce n'est pas pour autant un film qui s'apitoie sur le sort de son époque. Car ici, les vieux n'attendent pas la mort dans un fauteuil, ils sont toujours dans l'action. Et la nouvelle génération ne se laisse pas faire. Ce n'est pas parce que cela avait l'air mieux avant, qu'il nous faut s'empêcher de vivre. C'est ce que le réalisateur semble dire, en donnant le mot de la fin aux jeunes.
On rit de bon coeur, on s'attache aux personnages, qui sont finalement si proches de nous.... En sortant de la salle, on adopte la démarche lente et nonchalante de ces gangsters et on se dit que nous aussi, on aurait bien rêvé d'en être un.
"J'ai toujours rêvé d'être un gangster", de Samuel Benchetrit, sortie le 26 Mars 2008

lundi 17 mars 2008

juliette je t'aime



- De quoi ça parle?

Phillipe Claudel, écrivain a succès, réalise son premier film.

Une histoire sur la famille, la culpabilité, la vie, l'amour, la mort...Tout un programme!

Après avoir passé 15 ans en prison et avoir été rejetée par les siens, Juliette retrouve sa soeur, Léa, qui l'accueille dans sa famille....Un long travail sur soi, commence alors pour elle.

Comment pardonner à soi? Aux autres? Comment recommencer sa vie? Comment réapprendre à vivre?


- Qu'est-ce que ça donne?

Même s'il est le fruit de l'imagination d'un écrivain, ce film n'a pas été écrit comme un livre mais comme une vraie oeuvre de cinéma.

La preuve avec des personnages qui s'expriment par des silences, des regards et des petits gestes délicat....Ce n'est ni un film bavard, ni un film littéraire. Même si les livres sont très présents à l'écran.

Autour des deux actrices principales (Kristin Scott Thomas et Elza Zylberstein, toutes les deux remarquables), gravitent une galerie de personnages possédant chacun une histoire tragique, et aucune ne semble prendre le dessus sur l'autre.

Cette confrontation entre les divers personnages et leurs histoires permettent de densifier le film. Car ils ont tous une place importante dans la narration et répondent aux thèmes centraux qui sont l'enfermement et la solitude.

Les émotions sont transmises par des petits détails, de manière très subtile. Et ces petits détails de la vie, portés à l'ecran, nous reviennent à l'esprit longtemps après avoir vu le film.

On le porte avec nous, dans notre esprit.

Il est de ces films qui laissent sans voix, qui vous questionnent toute la soirée et qui vous suivent jusque dans votre lit. "Il y a longtemps que je t'aime" est de ceux là.

Tout comme la musique de Jean Louis Aubert, qui, en jouant de sa guitare sèche s'accorde avec ces êtres en déséquilibre, sur un fil...


"Il y a longtemps que je t'aime", de Phillipe Claudel, sortie le 19 Mars 2008

"noir c'est noir, quand il n'y a plus d'espoir..."



-De quoi ça parle?

Un tueur en série ensanglante Marseille. Louis Schneider, flic au SRPJ, mène l'enquête malgré l'alcool et les fantômes de son passé. Le passé resurgit aussi pour Justine. 25 ans plus tôt, ses parents ont été sauvagement assassinés par Charles Subra. Schneider l'avait alors arrêté. Mais aujourd'hui, par le jeu des remises de peine et pour bonne conduite, Subra sort de prison. Cette libération anticipée va alors réunir Schneider et Justine, deux êtres qui tentent de survivre au drame de leur vie.


- Qu'est-ce que ça donne?

Le nouveau polar d'Olivier Marchal est un vrai film noir, aussi noir que le plus serré des cafés (même si le personnage principal carbure plutot au Whisky).

Servi par un casting qui contient les plus belles gueules du cinéma français (Phillipe Nahon, Gerald Laroche et bien sur Daniel Auteuil), cette histoire ne laisse aucune place à l'espoir (ou presque).

C'est un vrai thriller, haletant, mais aussi un drame qui sort des tripes du réalisateur (il a lui même été policier) et qui réveille chez le spectateur les émotions les plus primaires. On en sort soufflé par l'intensité de l'entreprise (aussi bien au niveau de l'histoire, de l'interprétation et de la mise en scène).


MR 73, d'Olivier Marchal, en salle depuis le 12 Mars 2008